L'annulaire - 1994


Mon résumé
Une jeune ouvrière de 21 ans quitte son village et la fabrique de limonade dans laquelle elle a laissé un tout petit morceau de son annulaire, tombé dans une cuve de limonade ou disparu dans le désinfectant. Dès son arrivée en ville, elle trouve un emploi d'assistante-réceptionniste dans une sorte de laboratoire de spécimens où officie le docteur Deshimaru dont elle ne tarde pas à devenir la maîtresse. Le jour où celui-ci invite une cliente dans le laboratoire jusque là zone interdite, la jeune femme, jalouse, tente d'y pénétrer à son tour.
- Quand allez-vous lui rendre ces champignons ?
- Je ne les rends pas. Tous les spécimens sont rangés et conservés par nos soins. C'est la règle. Bien sûr, nos clients peuvent venir leur rendre visite quand ils le désirent. Mais la plupart des gens ne reviennent jamais ici. C'est le cas de la jeune fille aux champignons. Parce que le sens de ces spécimens est d'enfermer, séparer et achever. Personne n'apporte d'objets pour s'en souvenir encore et encore avec nostalgie. (p 23)
Un peu plus
Là encore, il s'agit d'une histoire mystérieuse, dérangeante, pour ne pas dire, troublante. Car comment qualifier cette relation pour le moins charnelle autour d'un bout de corps manquant, justement. Notre héroïne se laisse engloutir dans un univers qui semble comme dans une bulle de réalité. Elle s'adapte à ce nouvel emploi sans trop se poser de questions : des gens viennent se débarrasser de souvenirs, de traces d'une épreuve qu'il faut laisser derrière soi comme un serpent abandonne sa mue. A partir du jour où Deshimaru lui offre de magnifiques chaussures en cuir, elle se met à ses pieds, littéralement, elle devient sa chose, tout en remarquant chez lui un détachement qu'elle n'explique pas et qui la consumme.

Je retrouve le thème de la machine à écrire japonaise (déjà découvert dans La mer, dans le récit intitulé Le bureau de dactylographie japonaise Butterfly ; cette machine spéciale est longuement décrite au moment où la casse se répand par terre et que notre jeune femme passe la nuit à ramasser sous l'oeil imperturbable de Deshimaru, dans une ambiance pesante


Les sons tiennent également un belle place, comme dans le récit d'Amours en marge.

Cela avait dû faire un bruit effrayant, mais tout était calme au fond de mon oreille. (p 71)

Il est d'ailleurs question de réaliser le spécimen d'une partition, et le docteur Deshimaru trouvera vraiment une solution pour tout ! Le monde de Yoko est une sorte de zone de transition entre le monde réel et celui de nos fantasmes. Les personnages lèvent un rideau et basculent dans une réalité parallèle qui déborde de leurs convoitises. J'ai très envie de raconter la fin, mais je ne le ferai pas !

Titre original : Kusuriyubi no hyōhon
Traduit du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle
95 pages


Notons qu'il existe une adaptation cinématographique dont vous trouverez ma critique en cliquant sur ce lien.